Rencontre avec les Ecorceurs, un métier oublié

Rencontre avec les écorceurs, un métier oublié

Rencontre avec les Ecorceurs, un métier surement dans la liste des professions que personne ne connaît plus. Le métier saisonnier d’écorceur figure en bonne place.  La récolte de l’écorce des arbres a effectivement été incontournable dans les siècles passés, et ce depuis l’Antiquité. 

L’écorce avait une utilisation principale : celle d’être un élément déterminant dans le tannage. La transformation des peaux d’animaux en cuir dépend effectivement d’une transformation chimique provoquée par le tanin qui est obtenu en réduisant en poudre les écorces. Ce dernier permet de rendre imputrescible le cuir.

Concernant la récolte…

Creusons cette rencontre avec les écorceurs en nous intéressant  au processus de travail : La récolte s’effectuait généralement de début avril à fin juin rendue plus facile grâce à la montée de sève. C’était avec un écorçoir à spatule que l’écorce était prélevée du tronc dans les temps modernes, mais l’os animal a longtemps été utilisé pour cet usage. Les essences de chênes et de châtaigniers (à partir du 19ème siècle) étaient d’ailleurs les plus réputées pour la qualité de leur écorce.

Séchée à l’air pour éviter les moisissures, les écorces étaient regroupées en bottes puis livrées à des moulins à tan. D’autres utilisations plus minoritaires avaient aussi court : dans la construction, dans la confection d’objets (tabatière, portière de lanières…), dans l’industrie chimique (peinture..) ou en médecine (lutte contre la gangrène, hydropisie, abcès…). Ces dernières permettaient davantage un revenu d’appoint, comme c’était le cas pour l’écorce de Bourdaine. 

Rencontre avec les écorceurs, un métier oublié - Boite à outils
Rencontre avec les écorceurs, un métier oublié - Photo d'archive

Des connaissances essentielles …

En partant à la rencontre avec les ecorceurs, nous apprenons aussi qu’ils étaient de fins connaisseurs de la nature, des compétences nécessaireset complémentaires à leur savoir-faire.

« C’est des métiers de la terre, on est tributaire du temps… Faut pas qu’au 15 avril on ait des gelées, parce que ça vous refoule la sève et après ça ne va jamais bien » racontait un récolteur morvandiaux. Dans les années 1930, un écorceur pouvait à lui seul ramasser près de 15 tonnes d’écorce en une campagne.

Mais de l’écorçage « hors sève » se pratiquait également, notamment lors de la coupe de bois de construction ou de chantier naval. 

Après avoir servi au tannage, l’écorce était souvent récupérée pour former des sortes de galettes circulaires très comprimées. Après séchages, elles servaient de combustibles et étaient ou bien vendues ou bien utilisées dans les foyers des « façonneurs d’écorce ». L’économie circulaire où « rien ne se perd tout se transforme » (Lavoisier) n’est donc pas une invention des écolo bobo modernes mais bien une pratique « du bon sens populaire ». 

Le tannage naturel fut supplanté dans l’industrie par le tannage au sel de chrome beaucoup plus rapide, découvert au 20ème siècle. Le métier d’écorceur s’éteignit définitivement dans les années 1960. 

Alors, écorceurs, un métier oublié ? Ces petits métiers ont complétement disparu avec l’évolution des sociétés et des industries. S’ils sont peut-être contestables dans leur dimension sociale, ils offrent aujourd’hui de nouvelles perspectives dans les pratiques durables et circulaires qui pourraient être (ré)instaurer. Comme quoi, le passé aura toujours un mot à dire pour construire demain.

Portrait Jeanne Billiard

Je viens des portes du Morvan, dans la Nièvre (58). J’ai réalisé une licence de géographie à Dijon, puis un master de gestion des territoires et développement local à Clermont-Ferrand. Attachée aux lieux qui m’ont vue grandir, je me suis rendue compte que le patrimoine représente un élément fondamental qui permet de se reconnecter à son territoire pour s’y ancrer durablement, et qui permet la mémoire de ce qui a été qu’il ne faut pas oublier. Par mon métier, j’espère avoir l’occasion de lui redonner une place dans le cœur du grand public pour que le patrimoine prenne une place dans le quotidien, en l’entourant de nouvelles pratiques ou en remettant au goût du jour certains usages.